Techniques de réduction des risques d’inondations et d’épidémies dans Nkolbikok,ville de Yaoundé 6, Cameroun

Nkolbikok est unécosystème urbain de 73 ha situé dans le bassin versant de l’Abierguédans la ville de Yaoundé 6 au Cameroun. Dans ce bassin coule la rivière EdzoaMballa et ses trois affluents. De nombreux caniveaux et rigoles naturelles situés sur les versants les alimentent. Il est enclavé et peu équipé en biens et infrastructures de bases.

Sa population très cosmopoliteest composée de 4165 familles pour 25000 habitants.Elle y réside depuis plus de 50 ans et chaque famille possède un titre propriété notamment le certificat d’achat.

Les risques de catastrophes les plus redoutablessont les inondations et les épidémies. Les premiers y sont récurrents depuis que l’administration,en construisant une route à proximité,aérigé un petit pont lequel réduit le passage des eaux ajouté aux remblais qui ont rétrécit le lit d’eau en laissant la place aux constructions (habitations, latrines traditionnelles, porcheries, etc.) et aux déchets solides divers qui l’obstruent.Dans la région du Cameroun, il pleut six mois sur douze chaque année (avril, mai, juin, août, septembre, octobre et novembre).La proportion des familles de Nkolbikokexposéeest de l’ordre de 34% soit plus de 1400 ménages et 8500 habitants.A chaque inondation, ces familles perdent du mobilier et équipements de maison (chaises, téléviseur, etc.) des vêtements, des chaussures, des documents y compris ceux officiels à l’exemple des actes de naissances et des diplômes, etc. Les élèves y perdent leurs livres et autres fournitures scolaires.Les autorités sont peut sensibles au problème et aucune mesure de relèvement n’est prise en faveur des victimes après les épisodes.

Les seconds sont liés à la dégradation de l’environnement par les déchets solides et liquides notamment les eaux usées et les excréta. En effet, l’immense majorité de la population rejette en mélange leurs déchets solides dans les drains, cours d’eau et espaces non occupés. Ces déchets en mélange pourrissent puispolluent le sol et les eaux de surface. Les ouvrages d’assainissement des excréta sont constitués des latrines traditionnelles à double usage : toilette et cabinet. Généralement mal construits et à cause du mélange des eaux de bain et des excréta, ils sont malodorants et polluent les eaux souterraines et de surface. Faute d’adduction d’eau potable, les familles consomment les eaux souterraines contaminées en construisant des puits. Les maladies de la peau et d’origine hydrique affectent la majorité des résidents et surtout les enfants âgés de moins de 5 ans. Une étude menée en 2012 par le Laboratoire Eau, Environnement, Energie (L3E) de l’Ecole Nationale Supérieure Polytechnique de Yaoundé sur les enfants avait révélé que 51% souffrait des diarrhées.

Face à la situation chaque famille a d’abord construit un muret aux entrées de la maison pour retenir les eaux de crue. Cette solution s’est avérée peu efficace. Certaines familles ont déménagé pendant que d’autres organisent la riposte avecdesactions communautaires. Il s’agit à travers ces actions endogènes complémentairesde réduireles risques d’épidémies et d’inondations. Elles tournent autour de l’assainissement et des partenariats. En effet, la population a:

  • Curé le lit des rivières EdzoaMballa, ses affluents ainsi que les ouvrages de canalisation des eaux de pluie qui les alimentent. L’opération a consisté à libérer le passage des eaux en dégageant tous les encombrants (boîtes de conserve, les bouteilles plastique, etc.) et à élargir le lit pour augmenter sa capacité d’accueil des crues.Les déchets enlevés sont transportés à l’aide des porte-tout (pousse-pousse), brouette ou de camionnette aux différents points de prise en charge par les pouvoirs publics.A la suite du curage, des dégrilleurs sont placés pour retenir les ordures de manière à connaître leur origine ainsi que les auteurs.
  • organisé des rencontres d’échanges sur le sujet à la chefferie. Il s’agissait des moments de réflexion sur les solutions durables à apporter aux problèmes. Au terme des discussions, les populations dans l’ensemble ont décidé de ne plus jeter les ordures dans les drains et le cours d’eau. Chaque famille doit désormais déposer les ordures dans les bacs à ordures disposés à cet effet. Un service de pré-collecte est mis en place pour secourir les familles en cas de défaillances. L’intervention du service de pré-collecte est conditionnée par l’abonnement et l’engagement à verser la contribution négociée d’accord partie à la fin du mois. Cette contribution varie entre 1000 FCFA (1,53 euros) et 2500 FCFA (3,80 euros). Plus de 1000 familles se sont abonnées au service.

Par rapport aux eaux usées et excréta, la population a sollicité l’appui d’une ONG locale spécialisée sur le sujet. Il s’agit de l’ONG Environnement : Recherche et Action au Cameroun (ERA-Cameroun). Grâce à la collaboration, la population a :

  • eu des connaissances sur les latrines améliorées. Il s’agit des latrines sécurisantes non polluantes;
  • obtenu des subventions pour la construction des latrines améliorées. Les contributions demandées aux familles varient entre 30000 (46 euros) et 45000 FCFA (69 euros). Plus d’une cinquantaine d’ouvrages sont construits au profit des familles;
  • obtenu des subventions pour la constructionde quatre bornes fontaines. Elles permettront de servir de l’eau potable aux populationslimitant ainsi les contacts avec les eaux contaminées des puits et les maladies hydriques;

Enfin la population s’est organisée pour assurer le suivi des actions. Le territoire est alors découpé en cinq unités « quartier ». Chaque « quartier » a un comité « Comité d’animation et de développement (CAD) » ayant une assemblée générale et un bureau exécutif élu. Son but est de promouvoir le développement social par l’assainissement durable de l’environnement.

Le dispositif ci-dessusapermis de réduire les inondations et d’améliorer la qualité de l’environnement. Certaines familles y sont revenues. Les pouvoirs publics, entrées en scène à travers un Programme de restructuration « Programme Participatif d’amélioration des bidonvilles (PPAB) » ambitionne avec la population d’ouvrir les voies de desserte et de faire l’assainissement complet de l’environnement.

 

Auteur :

Jean Jules NKENGNE,

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